Vaiana, la légende du bout du monde

« Le bout du monde » : comment nier l’existence de peuples entiers

Note : Je préfère écrire Moana qui sonne mieux que Vaiana, même si en Europe on n’a pas pu garder la version originale à cause d’une stupide histoire de marque déposée (remarquez qu’en Italie c’est pire, le film s’appelle « Oceania » parce que Moana leur rappelle une actrice porno du nom de Moana Pozzi… hum). Et puis on passe au niveau du sens de « Moana = océan, mer profonde, grande étendue d’eau » à « Vaiana = eau de roche »… Pfff.

ATTENTION ! SPOILERS EN VUE !

Les qualités du film sont, sans surprise, son visuel bluffant, son absence de romance (pour un Disney, c’est un miracle), son humour (coucou HeiHei) et… c’est tout. Moana se veut dans la lignée des nouvelles productions, pleines de « girl power » mais quand on voit qu’elle ne peut réussir sa quête qu’après avoir obtenu l’aide d’un demi-dieu macho et ridicule… mais je croyais que Moana pouvait réussir par elle-même ? Hahaha, la blague. De plus, j’ai pu lire dans d’autres critiques qu’il est étonnant que les réalisateurs n’aient pas choisi de faire d’une déesse un personnage principal – alors que le panthéon polynésien en compte beaucoup. Je ne peux que les rejoindre sur ce point. La seule déesse du film se met en pétard, puis retourne faire dodo. On a vu mieux comme développement de personnages.

Et la musique ? Ah ben oui, faut que ça chante dans un Disney ! Vous noterez que je ne l’ai pas mentionnée dans les qualités du film car c’est un échec total. Je commence par où ? Le côté hyper américanisé façon « comédie musicale de Broadway » ? Le mélange improbable de différents éléments culturels polynésiens ? Improbable dans le sens où en uniformisant la culture polynésienne, en effaçant les spécificités de chaque peuple, eh bien les spectateurs vont rester dans leur ignorance. Par exemple, il y a une chanson (je ne sais plus laquelle) où on entend chanter en samoan sur des percussions tahitiennes… Imaginez un film présentant comme protagoniste un mélange de Français/Allemand/Belge. Et de dire : « Ouais, c’est recherché, on a fait des voyages d’études, on a interrogé la population locale ! » Donc sous prétexte de s’être déplacés, les réalisateurs peuvent balancer tranquillement leur vision cliché et exotique des différents peuples habitants la Polynésie ? Un peu de géographie, la Polynésie est une région, pas un pays ! On n’est pas loin des colons qui croient tout savoir et veulent asséner « leur » vision d’une partie du globe (idem en Asie, je vous passe le « de toute façon, ils se ressemblent tous ! »).

D’ailleurs en parlant d’uniformisation, ça se voit dans la musique (chorale du Fidji, percussions tahitiennes, chant en Samoan) et dans le casting des doubleurs. Dwayne Johnson a beau avoir des origines samoan par sa mère, ben le monsieur est de nationalité américaine et canadienne, et a un gros accent américain. Vous n’allez pas me dire qu’on ne pouvait pas engager un acteur samoan, fidjien, tahitien ou venant d’un autre pays de la région polynésienne…? Pareil pour la chanteuse Alessia Cara qui interprète la chanson principale (mais qui ne double pas le perso de Moana, c’est Auliʻi Cravalho qui joue le rôle), elle est Américaine d’origine italienne, ouah, très polynésien ! Je vous l’accorde, physiquement ça peut passer, elle ressemble à Moana mais y’a comme l’impression d’être trompé sur la marchandise (bon, j’ai pas trouvé de meilleure expression, pardon pour cette objectification).

Vous l’aurez compris, ce film est décevant. C’est un énième Disney lourd, maladroit et commercial qui ne veut que se faire du fric (Moana et Vaiana sont devenues des marques déposées Disney, merde ces mots appartiennent à une culture !!). Il y aurait encore beaucoup à critiquer mais je vous laisse lire les liens suivants :

Et j’aurai adoré entendre ce genre de musique dans le film plutôt que la bouillie américaine :

Je me suis limitée à 3 chansons/pays mais il y a d’autres nationalités à découvrir, à vous de chercher !

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Vaiana, la légende du bout du monde de Ron Clements, John Musker, Don Hall et Chris Williams (2016)

Article posté à l’origine sur Senscritique


Note du 3 mai 2020 : j’ai décidé de poster sur le blog les critiques que j’avais posté à l’origine sur Senscritique. Je me contente de copier-coller, je ne touche à rien, histoire de voir comment mes critiques évoluent. Je garde aussi la même date de publication.

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